J’en ai parlé l’autre jour sur Mastodon (Par ici, et suivez-moi sur Mastodon je dis plein de choses totalement sans intérêt ! Vous ne voudriez pas manquer ça.), et choses évoquées choses environ dues ! Je vais parler de Dragonflight. Pourquoi cette extension de World of Warcraft est un doux pansement sur mon cœur ? Je vous raconte tout ça.
Bien entendu, il y aura des spoilers. Il y en aura partouuuut. Je ne parle en revanche pas de la quête principale, uniquement de personnages secondaires ou au moins d’éléments non primordiaux. Ceci étant dit, c’est parti pour quelques axes de réflexion !
1 – Apaisement entre les factions
J’ai toujours trouvé la séparation Horde et Alliance trop rigide. Je ne suis pas la seule à en avoir parlé par le passé, mais la réaction générale de la communauté WoW (pas réputée pour sa qualité, certes) était souvent la même : « ça fait partie de l’ADN du jeu, et il faut bien favoriser les comportement toxiques pour attiser la haine entre les factions, pour le PVP ! » Personnellement, je fais clairement partie des gens qui estiment qu’un jeu ne devrait jamais favoriser la toxicité, et qu’on peut parfaitement se taper dessus en PVP et être potes le reste du temps. C’est pas la Guerre™, c’est un jeu. La nuance a son importance.
C’est donc avec un certain plaisir que je vois certaines limites tomber, parmi les plus pénibles. Les groupes mixtes, c’est très bien. Les mobs qui peuvent être tapés par tout le monde, c’est encore mieux. Pour celleux qui l’ignorent, au origines de WoW le premier joueur qui tapait un monstre était seul bénéficiaire de son loot, son expérience et son éventuel décompte pour une quête. Petit à petit, on a réussi à gratter un partage par faction (si un·e joueur·euse horde tapait un monstre, d’autres personnes de la horde pouvaient le taper et profiter de ce qu’il avait à donner, avec tout de même une limite en nombre de joueur. Un pauvre sanglier qui donne 400 cuirs, ça ferait un peu bizarre). Maintenant, il ne reste que la limite en nombre, ce qui annule un des comportements les plus pénibles du jeu : celui de voir des Alli- des joueur·euses de la faction adverse faire exprès de mettre une petite claque à tous les ennemis locaux, pour empêcher les autres de jouer. Un comportement bien merdique qui m’a souvent poussé à quelques insultes, voire des décisions bien plus radicales.
En gros, rapprocher les factions court-circuite beaucoup de petits comportement mesquins qui nuisaient tant à l’expérience de jeu. Bien sûr, il y aura toujours des gens pour trouver un moyen d’être des gros co- des personnes peu recommandables, MAIS c’est plus difficile. Je ne peux qu’espérer que les barrières tombent définitivement, elles n’ont plus de sens dans un monde où les personnages les plus importants communiquent facilement entre eux sans limite de faction alors que les joueurs sont visiblement incapables d’apprendre d’autres langues. C’est simplement ridicule.
On voit aussi que WoW apprend de la concurrence, et l’une des plus notables étant FFXIV qui aborde le pvp d’une façon totalement différente, j’espère vraiment beaucoup de la suite des évènements.
2 – Représentations
C’est une de mes plus grosses surprises, et surtout la meilleure : des personnages variés, de la diversité ! Enfin ! Et pas pour des personnages qui vont vivre 5 minutes, enfin pas que. On sent qu’ils ont bossé la question chez Blibli, avec par exemple de nombreux personnages LGBT+, et c’est pas dommage.
Par exemple, dès les premières quêtes, on rencontre un dragon un peu particulier. Lae camériste Sélistra nous donne quelques tâches à accomplir, mais on peut aussi lui parler pour savoir si iel se sent plutôt dragon ou vulpérine. Si on le fait,le dialogue suivant apparaît :
Certes, les dragons choisissent toujours une forme alternative plus proche des races mortelles, rien de nouveau. Ce qui l’est, c’est la façon de le présenter ici, et Sélistra est clairement écrit·e pour être non binaire. Même la personne au doublage a visiblement été choisie dans ce but , on n’est sur une voix assez neutre, et toutes les façon de décrire ce personnage sont orientées dans ce sens. Il est parfaitement naturel de dire « iel » quand on parle de Séli, ça tombe sous le sens. Dans un style un peu différent, j’en profite pour parler de Chromie, l’éternelle Chromie. Peu avant la sortie de l’extension, de courtes histoires ont été proposées sur le site officiel du jeu, hélas en anglais. Mais si vous lisez la langue de Neil Gaiman, alors n’hésitez pas à jeter un œil à « Visage Day« . On y découvre un Chronormu aux prises avec ses doutes peu avant la cérémonie du Jour du Visage, où il doit décider de sa forme mortelle. Il interroge de grands dragons qui vont le guider et l’aider à trouver sa forme… et deviendra Chromie, notre gnomette préférée. (Tant que vous êtes dans le coin, il y a également une histoire centrée sur Irion, « The Vow Eternal« , parce que Irion. Oui, c’est l’intégralité de la phrase.) Mais quand on croise Chronormu dans Dragonflight, il se genre au masculin et dit aimer son nom de naissance. Il précise cependant qu’on peut l’appeler Chromie par habitude ! Probablement qu’il aime juste être une gnomette parfois, et ça lui va bien.
Mais ce n’est pas tout. Les quêtes nous feront rencontrer des duos aux relations à priori platoniques mais incroyablement proches (comme les écologistes Tharu et Ishka, ou encore les deux dragonnes Akora et Keshki qui n’ont de cesse de vouloir se faire de merveilleux cadeau… Bref, des relations probablement uniquement amicales mais réellement très fortes.). Il y a aussi des couples sur lesquels le doute n’est pas permis, tel que le plus emblématique : Miguel et Thomas. Ces artisans nous donnent plusieurs quêtes, et sont clairement très amoureux. Les textes de leurs quêtes sont d’une grande douceur, ça fait vraiment du bien à lire. J’apprécie aussi de les voir maintenant en ville, sur un banc, tranquillement installés.
N’oublions pas non plus le couple Dawa et Narman, les centaures pas très doués qu’il faut aider jusqu’à ce qu’ils réussissent enfin à se demander en mariage. C’est vraiment une charmante suite de quêtes, surtout au milieu des centaures, qui sont un peuple plutôt austère.
Pour en finir avec les représentations LGBT, j’ai envie de terminer par celle qui est probablement la plus drôle et stupide. Si vous ne connaissez pas les gnolls, sachez que ce sont des sortes de canidés humanoïdes reconnus pour ne pas êtres d’une grande brillance. Bref, lors des quête on tombe un jour sur un ou une « Mon-arc Gnoll », et, oui, « Mon-arc » c’est bien pour « monarque ». J’avais prévenu, ils sont un peu cons. On peut engager avec ellui un court dialogue, qui suit :
J’avoue avoir eu un fou rire devant cette réponse pleine de sagesse.
Autre point de représentation sur lequel je suis sensible, vu qu’il me touche particulièrement, c’est celui du handicap. Dans un monde guerrier à tendance un poil viriliste, le handicap est très peu présent dans WoW. J’ai même déjà lu que grâce au jeu vidéo, on peut être « comme les autres », ne plus penser au handicap ! Quel argument confortable. Dans cette extension, pourtant, il y a au moins deux personnages handicapés (je suis peut-être passée à côté de certaines choses, ne m’en veuillez pas !). L’un d’entre eux est un dracthyr du nom d’Eraleshk, qui possède un fauteuil roulant car il ne peut ni marcher ni voler.
Certes, c’est un personnage qu’on voit très peu, contrairement à la Khan Sansok, sourde. C’est un personnage capital dans la suite des quêtes des centaures, la cheffe d’une des tribus principales, et elle est partout suivie par son interprète Okir. Il est ses oreilles et sa voix, et on le voit dans les cinématiques signer pour la Khan. Jamais on oublie qu’elle ne peut entendre, mais ça n’est un problème à aucun moment. On n’en parle pas réellement non plus, c’est un état de fait, et c’est tout. Une excellente représentation, donc.
3 – Espoir et nostalgie
Je ne peux pas fini cet article sans parler d’une chose qui m’a saisi dès mon arrivée aux rivages brisés : une ambiance très particulière, entre une douce nostalgie et une impression générale de remise en question. Cette impression s’atténue un peu avec le temps, les quêtes devenant un peu plus guerrières (même si ça reste assez raisonnable).
On parle beaucoup d’écologie, par exemple. Il y a moins de quêtes de type « va tuer X créatures » sans que la demande ne soit justifiée par un motif valable (une contamination par exemple, ou une corruption irrémédiable). On sent là aussi cette volonté d’apaisement, de sortir le joueur du mode par défaut « tout taper et réfléchir ensuite », et ça fait vraiment du bien.
Attention, je vais raconter des quêtes et ça sera forcément moins percutant que de les vivre sans savoir dans quoi on se lance, donc si vous envisagez de jouer, ne lisez pas la suite de cette partie, on se retrouve en conclusion !
L’une de ces quêtes m’a particulièrement marquée par son côté adorable : il faut accompagner un jeune iskaarien dans une grotte, où vit une terrible créature « voleuse de loutrèkes » de son village : le yéti Torteil. On comprend très vite que la créature en question n’est pas du tout agressive, et on parvient à communiquer suffisamment avec elle pour qu’elle fasse la morte face à l’enfant, très fier de lui d’avoir réussi à venger son village. Si on surveille l’action, Torteil a des réactions franchement mignonnes. Bref, une excellente quête très mal résumée.
D’autres quêtes prônent la tolérance et l’acceptation des autres, qu’on puisse communiquer ensemble ou non. Ainsi, on croise un groupe de jeunes aventuriers qui recueille un bébé animal, un groupe de petits iskaariens qui vient en aide à un bébé gnoll malgré le fait qu’ils leurs servent généralement de proie, et d’autres aventures de ce style. L’espoir d’un monde meilleur vient visiblement des enfants !
Mention spéciale à la quête du chien Taivan, qui est menacé d’être banni si on ne lui trouve pas d’utilité, au sein d’une culture plutôt guerrière et dure (mais attention, si on nous demande de l’aide c’est justement pour éviter d’en arriver là !). Taivan ne chasse pas. Il a peur, il refuse. Taivan n’est pas un bon chien de troupeau. Taivan… Ne sert à rien. Jusqu’au moment très opportun où on comprend que cet énorme chien veut aider les autres, tout simplement, et en fait la démonstration à deux reprises. Ainsi, la quête se termine au moment où il aide à faire parler une jeune centaure murée dans le silence suite à un deuil, et s’allonge auprès d’elle. Bon gros chien !
D’autres quêtes sont également empreintes de regrets ou de deuil (la quête du druide qui pleure encore la perte d’Ysera est un petit crève-cœur, notamment parce que la première partie est très amusante et qu’on comprend finalement tard qu’il est tout simplement en deuil…). Il y en a notamment deux qui m’ont transpercé le cœur, parce que je n’y était tout simplement pas préparée. On est rarement triste, dans WoW. On est là pour jouer et taper des trucs, non ? Visiblement, pas seulement.
- La première est la quête du « nain dragon » Véritistrasz. Elle apparait pour la première fois au milieu des quêtes de leveling, on est pressé, on veut gagner tout plein d’xp, et on voit ce nain assis au bord du vide. Il est seul, et il nous propose de nous asseoir un instant. Il faut simplement lui parler, ça c’est de l’xp cadeau ! Alors on s’assoit. Et il nous raconte. La guerre, lointaine. La perte d’un être cher. L’oubli progressif de cette même personne. Pendant qu’il parle, il y a l’agitation des autres joueurs qui volent, courent, remplissent un tas d’objectif. Mais on est là, avec cette personne qui raconte ce passé, avec juste ce qu’il faut de tristesse et de regret, rien de plus. Pas trop de pathos. Et on n’a plus jamais envie de se lever. Le texte est vraiment très bien écrit, et remue forcément des choses quand on commence soi-même à vieillir. Un très beau moment de jeu vidéo.
- La seconde quête est celle qui aura le plus de chances de vous tirer des larmes. On suit les orcs Kolgar et Duroz, car ce dernier est âgé et blessé. Son ami cherche de l’aide pour le soigner, alors on en demande aux dragons, qui acceptent fort gentiment. Cependant, le problème principal est l’âge de Duroz, et très vite on comprend que les dragons ne font pas de miracles. Qu’importe, Kolgar tient à remettre son ami sur pieds ! Maiiiis… Duroz n’a pas envie de guérir, c’est limpide. Il veut faire plaisir à son ami, on sent toute sa bonne volonté pendant la plus grande partie de la quête. Sauf qu’il a trop vécu, et fait trop de mal. Là, au milieu des dragons, ils repense à tous ceux qu’il a tué. Il raconte, il se souvient. Armé d’un remède, la quête nous demande de le lui faire boire. « Faire boire »… C’est le texte, alors on donne la tisane à Duroz, qui s’assoit tristement au bord du ruisseau, alors qu’un jeune dragonnet vient se lover contre lui. Il dira « J’ai massacré des Dragonnets plus jeunes encore que ceux-là, Kolgar. Il est des crimes que l’on ne peut racheter. ». On peut suivre un long monologue de sa part, mais même en restant jusqu’au bout on comprend qu’il ne boira jamais le remède. Et la suite se passe sans nous, alors que nos aventures nous poussent au loin. Le sort de Duroz ne sera connu qu’à notre retour au même endroit plus tard dans le jeu. Et on en repartira le cœur en miette.
Globalement, je comprends ces deux quêtes de plusieurs façon. On n’est pas dans un texte type « la guerre c’est mal », mais vraiment dans l’idée qu’elle est vaine, et cruelle bien sûr. Et dans le contexte du jeu, dans un monde qui renaît après un long sommeil, les vieille valeurs sanguinaires n’ont plus leur place. Ceux qui n’ont pas eu le choix sont traumatisés par leur expérience, ceux qui l’ont eu sont hantés par les regrets. Ces quêtes sont d’une infinie tristesse à vivre, et vraiment très très bien écrites. Je l’ai lu plusieurs fois, mais une seule de ces quêtes provoque un plus grand investissement émotionnel que toute l’extension précédente, et pourtant j’ai essayé !
Conclusion
Il parait que Dragonflight ne marche pas bien. Je n’en sais rien, j’ai pas les chiffres. Mais si c’est vrai, alors c’est vraiment, honteusement, tragiquement dommage. Le niveau d’écriture est radicalement meilleur que sur l’extension précédente, ce continent est plein d’espoir et d’optimisme, les émotions sont partout, pour peu qu’on accepte de prendre 5 minutes de son temps pour être autre chose qu’un robot décérébré qui se contente de taper sur tout ce qui bouge (ou non). Pour le pratiquer depuis bientôt 16 ans, je sais que la communauté WoW n’est pas la meilleure. MAIS. Tout en sachant cela, tout en connaissant la toxicité ambiante, on nous offre un contenu doux, qui donne vraiment envie de s’investir, avec des personnages variés et attachants. C’est un risque énorme.
Je ne dis pas que le jeu parfait, et pour le moment la quête principale me semble paradoxalement un peu faible, mais en même temps je ne les ai jamais trouvé d’un niveau incroyable jusque là… Notre belle bande de dragons ajoute quand même un bonus +20 en charisme (Irion à lui seul offrant déjà un +15), et je me demande où tout cela va nous mener. En attendant je m’amuse follement, avec les courses de dragons, les photos à prendre ou la cuisine aléatoire iskaarienne à faire. Et il y a des loutres. Genre, vous savez où vous êtes, qui je suis, vous connaissez le nom du site, je suppose qu’il est inutile que j’insiste sur ce point.
Je ne dis pas non plus qu’il faut l’aimer à tout prix, bien sûr que ce qui me touche moi ne touchera pas tout le monde de la même façon, et inversement. Mais je vois là une chance de montrer que ce tournant est une bonne chose, on peut continuer à modifier ce monde que j’aime tant pour en faire un lieu accueillant pour tous·tes. Et, oui, c’est une bonne chose. J’ai du mal à accepter que ce soit même un débat, en fait. Les « joueurs historiques » qui se plaignent que c’était mieux avant, c’était vraiment difficile, ah ah on en chiait vraiment à l’époque, etc etc… Ben non, en fait. Je suis une joueuse historique finalement, et c’était pas mieux. C’était excluant, et souvent un peu idiot. Il y a toujours du contenu difficile si vous avez envie de le faire, la différence c’est qu’il y a bien d’autres types de contenus à faire si ça ne nous intéresse pas de prouver qu’on a la plus grosse (monture, bien sûr). J’espère vraiment que tout ce qui a été gagné là ne disparaitra pas.
Bref, jouez-y en fait, pourquoi c’est pas déjà installé HEIN ?
C’est juste l’écran de chargement, mais il est vraiment classe.Et on peut télécharger chaque artwork en format wallpaper sur le site officiel du jeu ! Je vous laisse deviner le mien. Il y a des indices subtiles dans l’article.